Jonathan Monk à Espace Muraille
Pour marquer les 10 ans de la galerie Espace Muraille, l’artiste conceptuel Jonathan Monk a conçu un projet d’exposition sur le thème de la fenêtre. L’occasion pour l’artiste de jouer avec ce motif présent de longue date dans sa pratique.
Dans les locaux d’Espace Muraille, la curation de l’exposition Some Time Spent Looking Through a Window par Jonathan Monk (1969) fait la part belle à la diversité. L’artiste n’a en effet pas souhaité faire un solo show, mais plutôt entrer en dialogue avec d’autres créateurs présentés par la galerie durant ses dix années d’existence. Ses œuvres voisinent ainsi avec des pièces de Louise Bourgeois, Olafur Eliasson, Ugo Rondinone ou encore Sherrie Levine, pour n’en citer que quelques uns.
À la fois cadre et ouverture, élément d’architecture fixe mais pensé pour être activé, la fenêtre est un objet contradictoire ou plutôt, un motif changeant, dont la fonction varie selon le point de vue. Cette ambiguïté a eu le don d’inspirer de nombreux artistes qui se sont emparés du thème au sens littéral aussi bien que métaphorique. Situé dans les anciennes caves d’un hôtel particulier du XVIIIe siècle, l’espace d’exposition n’a lui-même aucune fenêtre, un paradoxe involontaire qui, d’une certaine façon, renforce la puissance des œuvres présentées.
La pratique de Monk est souvent marquée par des références à l’histoire et au marché de l’art, mais avec une touche d’humour et de légèreté. Ainsi, il n’hésite pas à disposer une paire de sandales à talons appartenant à Caroline Freymond, la maîtresse des lieux, sur l’une de ses boîtes à lumière ornant l’un des murs de la galerie. Cette série, Life and Death Lightbox, présente des tubes fluorescents scellés dans des boîtes transparentes et condamnés à s’éteindre sans jamais pouvoir être remplacés. Jouant avec les volumes de la salle autant qu’avec des éléments de proximité formelle, Monk rapproche cette série des peintures minimalistes et colorées Anima Mundi de l’Allemand Imi Knoebel (1940).
Dans la même salle, deux autres œuvres de Monk incarnent un autre type de fenêtes. Tirées de la série Something To See Something To Hide, l’artiste les présente ainsi : « Il s’agit de vieux rideaux que j’ai trouvés dans la maison de ma mère qui avaient eux-mêmes été utilisés comme toiles de protection pour peindre et décorer... Dans le tissu fleuri, on voit des traces et des gouttes de peinture blanche laissées par mes parents. Le titre est tiré d’une pièce de Boetti intitulée Nothing To See Nothing To Hide – une sorte d’inversion donc... Se cacher derrière des rideaux espionnant vos voisins... Les cadres des fenêtres sont inspirés de mon ancien appartement à Rome, juste au coin de la rue de l’ancien studio d’Alighero. Il s’agit simplement d’une grande fenêtre adossée à un mur. L’encadrement pourrait être vu comme un support structurel pour une peinture... ».
L’humour encore caractérise l’accrochage du pallier, que Monk a choisi pour accueillir une minuscule toile (10x15cm) d’Andreas Eriksson (1975), contrastant avec les vastes volumes de l’escalier menant au sous-sol où l’exposition se poursuit. Une toile de Pierre Lesieur (1922-2011) fait face à une sculpture d’Olafur Eliasson (1967), Borrow wall view.Superposition de verres colorés, cette dernière est caractéristique de l’intérêt de l’artiste islandais la lumière et ses effets visuels, les transparences, la couleur et les formes géométriques.
Dans la grande salle du sous-sol, on retrouve notamment plusieurs pièces de la série Studio Window (with balls), peintes pour l’occasion. Ces dernières représentent la vue depuis l’intérieur du studio de Monk. Au centre de la salle, Fallen Exit Door, une grande sculpture de bois dotée d’une poignée de porte, est présentée par l’artiste comme un véritable portail vers l’au-delà. Elle s’impose comme la conclusion logique d’une exposition consacrée à ce que l’on peut voir en passant un moment à regarder par une fenêtre.
Pratique :
L’exposition Some Time Spent Looking Through a Window est à voir du 20 septembre au 14 décembre 2024.
https://www.artageneve.com/lieu/galeries/espace-muraille
Photo : @Espace Muraille